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Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) et Loi Climat

  • Photo du rédacteur: Goldstein Carbon
    Goldstein Carbon
  • 23 mai
  • 4 min de lecture

Le mécanisme européen d'ajustement carbone aux frontières (MACF), qui entrera en vigueur dès 2026, marque le début d'une nouvelle ère pour les pays exportateurs opérant dans des secteurs à forte intensité carbone. La Turquie, en tant que sixième partenaire commercial de l'UE, fait partie des pays directement concernés par cette transformation.


La mise en place du MACF représente pour la Turquie une transformation complexe qui n'est pas seulement environnementale, mais également économique, commerciale et géopolitique. Dès 2026, l’UE appliquera une tarification carbone sur les importations issues des secteurs à forte intensité carbone (ciment, acier, aluminium, engrais, électricité). Ce mécanisme vise à éviter les fuites de carbone, à renforcer la compétitivité des industries européennes et à encourager une tarification mondiale du carbone.



 Pays les plus impactés par le MACF européen et position de la Turquie

Selon un rapport conjoint de la BERD et du ministère turc de l’Environnement, de l’Urbanisme et du Changement Climatique, les secteurs turcs de l'acier et du ciment seront les plus touchés par le MACF. Avec une hypothèse de tarif MACF de 75 €/tCO₂e, les coûts annuels potentiels pour l'industrie turque pourraient atteindre 138 millions d’euros dès 2027, et s'élever jusqu'à 2,5 milliards d’euros par an d'ici 2032 avec un tarif de 150 €/tCO₂e.

 

Que peut-on faire pour éviter ce scénario ?


La mise en place d’un système national de tarification du carbone pourrait réduire considérablement ces coûts. Par exemple, avec un tarif national de 20 €/tCO₂e, les coûts annuels du MACF pourraient être ramenés à 56 millions d’euros en 2027.



Répartition des coûts MACF des secteurs ciment et acier en Turquie et effets d’un SEQE national

Le graphique présente la répartition sectorielle des coûts projetés du MACF. Les secteurs du ciment et de l’acier supportent les coûts les plus élevés, atteignant environ 1,6 milliard d’euros dans le scénario à 150 €/tCO₂e.


En revanche, l’instauration d’un système national d’échange de quotas d'émission (SEQE) avec un tarif par exemple à 50 €/tCO₂e pourrait significativement réduire ces coûts, démontrant ainsi l’efficacité d’une tarification locale du carbone pour préserver la compétitivité internationale de la Turquie.


Tableau des options politiques turques pour réduire les coûts du MACF

Le tableau ci-dessus présente de manière comparative les impacts potentiels de différentes politiques de réduction des émissions de carbone sur les coûts du MACF. Le MACF européen vise à égaliser les coûts du carbone entre les produits importés et ceux produits localement. L'impact du MACF dépendra donc fortement de la politique climatique choisie par la Turquie :


  1. Un SEQE directement connecté au SEQE européen offre la seule exemption totale du MACF. Les importateurs n’auront ainsi plus besoin d’acheter des certificats MACF.

  2. Un SEQE indépendant permet aux importateurs d'obtenir une réduction partielle proportionnelle au tarif carbone national payé, mais ne procure pas une exemption complète.

  3. Les politiques alternatives (par exemple, les normes d'efficacité énergétique) contribuent à la réduction des émissions mais ne réduisent pas directement les coûts du MACF.

  4. L'intégration des marchés de l'électricité de la Turquie avec ceux de l'UE pourrait, en cas de conformité avec les objectifs climatiques et d’énergies renouvelables, permettre une exemption du MACF sur les importations d’électricité.

  5. Un cadre politique de soutien rendrait la tarification carbone plus efficace et accélérerait la décarbonation, mais ne réduirait pas directement les coûts du MACF.


La Turquie est-elle prête à la tarification carbone ?


La Turquie a largement mis en place l’infrastructure nécessaire à la tarification carbone grâce au programme PMR de la Banque mondiale entre 2013 et 2020. Les systèmes de suivi, de rapport et de vérification (MRV) et une réglementation provisoire pour un SEQE national sont déjà prêts. La mise en place d’un SEQE national permettrait de réduire les coûts du MACF, de soutenir la production bas-carbone et de générer des revenus pour financer des investissements verts.


Selon les modélisations, une tarification nationale du carbone pourrait générer des revenus publics supplémentaires de 1,5 milliard d’euros d'ici 2032, revenus pouvant être utilisés pour la décarbonation industrielle. Toutefois, pour garantir l’efficacité de ce système, des politiques de soutien, la suppression des subventions aux combustibles fossiles ainsi qu’une large participation des parties prenantes sont indispensables.


En conclusion, le MACF ne doit pas seulement être vu comme un coût, mais comme une opportunité stratégique permettant à la Turquie d’opérer sa transition vers une industrie bas-carbone.


Qu’est-ce que la loi climat ? Est-elle entrée en vigueur ?


Le premier projet de loi climat turque, aligné sur l’objectif de zéro émission nette pour 2053, vise à inscrire légalement la lutte contre le changement climatique. Cette loi couvre la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation au changement climatique, l’encouragement des énergies renouvelables et la production respectueuse de l’environnement. Elle prévoit également la création de conseils provinciaux de coordination sur le changement climatique et l’élaboration de plans d’action locaux.


Cependant, ce projet de loi a été provisoirement retiré des discussions parlementaires en Turquie, offrant ainsi une opportunité de le repenser de manière plus globale et participative.


L’adaptation de la Turquie au MACF et la mise en œuvre effective de la loi climat permettront non seulement de préserver ses marchés à l’exportation, mais aussi d'avancer significativement vers une transition verte et un développement durable.



Références :

Le graphique 2 et le tableau 1 sont extraits du rapport mentionné ci-dessus.

 

 

·       Beken, H. G., & Cebeci, A. (2024). Çatışmalı bir Süreç Olarak Sınırda Karbon Düzenleme Mekanizması Uygulaması. Paradigma: İktisadi Ve İdari Araştırmalar Dergisi, 13(2), 115-128.

 

·       İmer-ertunga, E., & Seyhun, Ö. K. (2022). SINIRDA KARBON DÜZENLEME MEKANİZMASI VE TÜRKIYE’NİN İHRACATINA OLASI ETKİLERİ. Ege Stratejik Araştırmalar Dergisi, 13(1), 1-13. https://doi.org/10.18354/esam.1119230

 

·       Saraçoğlu, F., & Kutlu, M. (2025). Sınırda Karbon Düzenleme Mekanizması ve Türkiye’ye Olası Etkileri. Ankara Hacı Bayram Veli Üniversitesi İktisadi Ve İdari Bilimler Fakültesi Dergisi, 27(1), 1-26. https://doi.org/10.26745/ahbvuibfd.1593438



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